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Finance Pourquoi, selon McKinsey, la rentabilité des banques africaines baisse et comment y remédier (rapport)

Abidjan,le 20 décembre 2022(Agence Ecofin) - Le rendement des fonds propres des banques opérant sur les cinq plus grands marchés du continent a reculé de 2,6 points de pourcentage depuis 2016, sous l’effet combiné de la baisse des marges et du maintien des coûts d’exploitation à des niveaux élevés.

Malgré un redressement de leurs bénéfices depuis 2021, les banques africaines peinent à inverser la tendance baissière de leur rentabilité apparue bien avant la pandémie du coronavirus en raison notamment d’un ratio coût/revenu très élevé, a indiqué le cabinet de conseil en stratégie McKinsey dans un rapport publié le 6 décembre.

Le rapport souligne que, depuis le début de l’année en cours et malgré les incertitudes macroéconomiques, les revenus des banques africaines sont désormais supérieurs aux niveaux pré-pandémie, grâce à des augmentations de volumes soutenues, des taux d’intérêt plus élevés et des coûts du risque stables. A l’exception des banques kenyanes, le rendement des fonds propres (ROE) des divers établissements de crédit du continent reste cependant encore inférieur d’un à deux points de pourcentage aux niveaux d’avant pandémie malgré un fort rebond en 2021.

Cela s’explique en partie par le fait que cette tendance baissière de la rentabilité est antérieure à la crise sanitaire. McKinsey révèle dans ce cadre que le ROE des banques est en baisse constante depuis 2016 sur les cinq plus grands marchés bancaires du continent (Afrique du Sud, Egypte, Kenya, Maroc et Nigeria). Ce ratio, qui mensure la rentabilité des capitaux propres que les actionnaires d’une banque mettent à sa disposition, a diminué en moyenne de 2,6 points de pourcentage au cours des six dernières années sur les cinq marchés.

Ce chiffre masque des disparités entre les différents pays. L’Egypte a connu la plus forte baisse (-9,5 points de pourcentage), suivie par l’Afrique du Sud (-2,7 points) et le Maroc (-2,1 points). Partant d’une base faible, le Nigeria est la seule grande économie africaine à avoir connu une augmentation du ROE de son secteur bancaire depuis 2016 (+3,6 points de pourcentage), sous l’effet d’une baisse du coût du risque consécutive aux réformes économiques engagées par le gouvernement après la récession de 2016, d’une remontée des prix du pétrole, d’un assouplissement précoce des restrictions sanitaires liées à la pandémie du Covid-19 et des mesures de restructuration (forbearance measures) décidées par Banque centrale.

Le rapport attribue cette tendance baissière de la rentabilité à un recul des revenus nets d’intérêts (les marges provenant de la différence entre l’intérêt qu’une banque gagne sur les prêts consentis à ses clients et l’intérêt qu’elle verse aux épargnants et autres créditeurs pour utiliser leur argent, Ndlr) ; un environnement majoritairement marqué par des taux d’intérêt décroissants, et à une diminution des marges de frais et de commissions due à une concurrence accrue et à la numérisation à marche forcée des services bancaires.

Six pistes pour réduire les coûts d’exploitation

Dans le même temps, les coûts d’exploitation sont restés constants. Par exemple, au Maroc, les coûts d’exploitation moyens de 2016 à 2021 sont restés stables autour de 2,3 %, tandis que les revenus nets d’intérêts ont diminué de 2,0 % à 1,8 %. Cela a contribué à faire baisser le rendement des fonds propres moyen de 9,2 % en 2016 à 7,1 % en 2021.

L’analyse de McKinsey montre en effet que les banques opérant sur la plupart des marchés africains ont des ratios coût/revenu (CIR ou cost-income-ratio/CIR) très élevés. A l’échelle continentale, le ratio moyen coût/actifs est compris entre 4 et 5 %, soit un niveau deux fois plus élevé que la moyenne mondiale.

Pour améliorer leur rentabilité, les banques africaines devraient donc remédier aux divers blocages en matière de productivité, en procédant à des révisions de leur structure de coûts et en réinventant leurs modèles d’exploitation.

Dans cette optique, McKinsey a identifié six domaines prioritaires où une meilleure allocation des ressources pourrait contribuer à améliorer la productivité, tout en apportant une valeur ajoutée aux clients et en aidant les gouvernements à faire progresser l’inclusion financière.

Il s’agit en premier lieu de développer les canaux numériques dans le métier de la banque de détail pour réduire le coût des services bancaires. Actuellement, l’adoption de canaux de distribution digitalisés se situe entre 25 et 30% en Afrique contre 50% en Asie et en Amérique latine. Une numérisation de bout en bout des processus pourrait se traduire par une réduction de 30 % du coût des services par rapport aux agences.

La deuxième piste à creuser concerne le renforcement de la digitalisation du middle-office et du back-office. Dans ce chapitre, des opérations automatisées pilotées par l’intelligence artificielle (IA) pourrait se traduire par réduction des coûts de 40 à 60%.

Par ailleurs, les banques africaines devraient intensifier leurs investissements dans les technologies les plus avancées pour automatiser les tâches manuelles et accélérer la migration des applications et des infrastructures informatiques vers le cloud.

Dans le domaine des « fonctions support » (analystes risques, experts en fiscalité, contrôleurs de gestion, juristes, gestionnaires de ressources humaines etc.), McKinsey recommande aux banques africaines de confier leurs opérations à un centre de services partagés ou bien de les automatiser complètement grâce aux bots et à des logiciels de machine learning.

Sur un autre plan, les banques gagneraient à introduire plus de flexibilité dans la gestion de leurs actifs immobiliers (locaux et agences) en offrant à leurs employés la possibilité de travailler à domicile grâce à la migration vers les plateformes de cloud computing ou encore en renégociant les baux des agences.

Et last but not least, McKinsey presse les banques africaines d’utiliser des techniques d’intelligence artificielle dans leurs départements approvisionnement, notant qu’elles peuvent par exemple utiliser la reconnaissance optique de caractères (ROC) et le traitement automatique du langage naturel (natural language processing/ NLP) pour payer les fournisseurs ou encore des outils de machine learning pour améliorer le coût de gestion de la trésorerie dans les agences et les distributeurs automatiques de billets.
Agence Ecofin

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