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Dans l’affaire Gbagbo, Me Altit demande plusieurs documents

Dans ce document, l’avocat principal de Laurent Gbagbo, Me Emmanuel Altit, demande à la Chambre d’appel de la Cour pénale internationale (Cpi), d’«ordonner au greffe, de communiquer le plus rapidement possible à la défense », la version officielle française d’un certain nombre de documents.

Version publique expurgée de la requête de la défense aux fins d’obtenir de la Chambre d’appel que, compte tenu de l’urgence,

1) elle ordonne au greffe de communiquer à la défense le plus rapidement possible la version officielle française de l’opinion du juge Henderson datée du 16 juillet 2019, de l’opinion de la Juge Carbuccia datée du 16 juillet 2019 et du mémoire d’appel de l’accusation du 15 octobre 2019 ;

2) elle confirme que la période dont dispose la défense de Laurent Gbagbo pour répondre au mémoire d’appel du procureur ne peut courir qu’à partir de la notification à la défense de la version française officielle de ces documents ».

1. La présente requête est déposée à titre confidentiel en vertu de la Norme 23 bis (2) puisqu’elle renvoie à des requêtes classées « confidentiel ».

I. Rappel de la procédure

2. Le 15 janvier 2019, la majorité de la Chambre de première instance I faisait droit à la demande de la défense de Laurent Gbagbo et acquittait ce dernier de toutes les charges portées contre lui. (…)

21. Le 25 octobre 2019, la République de Côte d’Ivoire déposait une « Demande d’autorisation aux fins de présenter des observations écrites de la République de Côte d’Ivoire sur la « Requête de la défense afin d’obtenir que la Chambre d’appel restitue à Laurent Gbagbo, acquitté de toutes les charges portées contre lui, l’intégralité de ses droits humains fondamentaux », 7 octobre 2019, ICC-02/11-01/15-1272 ».

22. Le 28 octobre 2019, la défense demandait à ce que la demande de la République de Côte d’Ivoire soit rejetée.

23. Le 8 novembre 2019, le greffe déposait une « Transmission of application for victim participation in appeal proceedings and related report ».

24. Le 18 novembre 2019, la défense déposait des [Expurgé].

25. Le 19 novembre 2019, la traduction en français de la « Version corrigée de l’acte d’appel de l’accusation daté du 16 septembre 2019, ICC-02/11-01/15-1270 » était notifiée aux parties et partici-pants.

26. Le 20 novembre 2019, la défense de Charles Blé Goudé déposait des [Expurgé] 32.

II. Discussion

27. Le 10 octobre 2019, avant le dépôt par l’accusation de son mémoire d’appel, la défense demandait à la Chambre d’appel de faire en sorte que Laurent Gbagbo puisse recevoir en français le jugement d’acquittement, l’acte d’appel et le mémoire d’appel du procureur, afin que le droit dont il dispose de pouvoir prendre connaissance de ces éléments cruciaux dans sa langue avant de répondre au mémoire d’appel du procureur soit respecté.

28. La défense rappelait dans cette requête que le fait pour Laurent Gbagbo de pouvoir disposer dans sa langue de ces éléments – les éléments les plus essentiels à la compréhension de la procédure, puisqu’il s’agit du jugement d’acquittement et de la position du Procureur relativement à ce jugement d’acquittement – avant de répondre au procureur était une condition essentielle de la préservation du caractère équitable de la procédure.

Comment en effet pouvoir répondre à des arguments, lors d’un débat aussi essentiel, si l’on ne comprend pas la langue dans laquelle ces arguments sont exposés ?

La défense rappelait à ce propos que sa langue de travail est le français, l’une des deux langues de travail reconnues officiellement par la Cour.

La défense précisait que la forcer à travailler en anglais entrainerait de facto une rupture de l’égalité de la procédure au bénéfice des parties et participants utilisant l’anglais comme langue de travail.

29. Par conséquent, dans cette requête, la défense demandait à la Chambre d’appel de dire que le laps de temps dont Laurent Gbagbo dispose pour répondre au mémoire d’appel du procureur ne pouvait courir qu’à partir de la notification en français à la défense de

1) l’opinion du juge Henderson datée du 16 juillet 2019 ;

2) l’opinion de la juge Carbuccia datée du 16 juillet 2019 ;

3) la version corrigée de l’acte d’appel déposée le 17 septembre 2019 en anglais; et

4) du mémoire d’appel de l’Accusation qui allait être déposé.

30. Aujourd’hui, plus d’un mois après le dépôt par le procureur de son mémoire d’appel, la défense n’a reçu notification en français que de l’ac-te d’appel du 17 septembre 2019.

La défense n’a reçu aucune d’information sur la date à laquelle elle pourra dis-poser de la version française des documents visés dans sa requête.

Il est à noter qu’elle n’a toujours pas eu de réponse à son email du 18 juillet 2019 dans lequel elle demandait aux services compétents du greffe la date à laquelle elle pourrait disposer de la version française du jugement d’acquittement.

31. La défense n’a obtenu à ce jour aucune réponse à ses demandes. En particulier, les services du greffe ne se sont jamais manifestés depuis que la défense a posé le 18 juillet 2019 la question de savoir quand la traduction en français du jugement d’acquitte-ment lui parviendrait. Or, tant que ce jugement et le mémoire d’appel du procureur n’ont pas été transmis en français à la défense, le délai de réponse prévu à la Norme 59 du Règlement de la Cour ne peut pas commencer à courir. Concrètement, cela signifie ici que la période de réponse de 60 jours prévue à la Norme 59, qui se serait achevée le 16 décembre 2019 si la défense avait été notifiée de tous les éléments utiles en français au jour du dépôt de son mémoire d’appel par le procureur, n’a pas encore commencé à courir et que par conséquent, la date du 16 décembre 2019 ne peut être retenue comme terme de la période de réponse offerte à la défense.

32. Il appartient à la Chambre d’appel, comme le lui demandait la défense dans sa requête du 10 octobre 2019 et compte tenu de l’urgence, de rappeler aux parties et participants que le délai de réponse au mémoire du procureur ne peut courir qu’à partir de la notification en français des documents visés dans la requête de la défense du 10 octobre 2019, afin que le cadre dans lequel la procédure d’appel se déroule soit clair pour tous.

33. Il appartient aussi à la Chambre d’appel d’ordonner aux services concernés du greffe de communiquer le plus rapidement possible à la défense l’opinion du juge Henderson datée du 16 juillet 2019, l’opinion de la juge Carbuccia datée du 16 juillet 2019, et le mémoire d’appel de l’accusation du 15 octobre 2019.

34. La Chambre d’appel est la garante de la bonne menée de la procédure d’appel, la garante des droits de la défense et la protectrice du caractère équitable du procès. C’est pourquoi la défense demande respectueusement à la Chambre d’appel de rappeler quels sont les droits de Laurent Gbagbo et en quoi l’application de ces droits détermine le déroulé de la procédure. Par ces motifs, plaise à la Chambre d’appel, de :

  • Ordonner au greffe de communiquer le plus rapidement possible à la défense de Laurent Gbagbo la version officielle française :
    • De l’opinion du juge Henderson datée du 16 juillet 2019 ;
    • De l’opinion de la juge Carbuccia datée du 16 juillet 2019 ;
    • Et du mémoire d’appel de l’accusation du 15 octobre 2019.
    • Confirmer que la période dont dispose la défense de Laurent Gbagbo pour répondre au mémoire d’appel du procureur ne courra qu’à partir de la notification en français à la défense de ces documents.

Emmanuel Altit

Conseil Principal de Laurent Gbagbo

Fait le 22 novembre 2019 à La Haye, Pays-Bas

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