La pièce théâtrale “Kako sans Chaos”, jouée vendredi soir au Palais de la Culture de Treichville, a mêlé humour, tension et émotion pour plonger le public dans l’histoire d’un village en quête d’un nouveau chef.
Hier soir, il y avait comme un parfum de fête au Palais de la Culture de Treichville. Dans le hall, ça se saluait, ça riait, ça posait pour des selfies avant même que la salle ne s’ouvre. Les parfums se mêlaient à l’odeur familière de la lagune Ebrié, et on sentait cette impatience particulière qui précède les grands moments.
Lorsque les lumières se sont éteintes, un silence lourd a enveloppé la salle, vite brisé par les premières notes de musique et l’apparition des comédiens. “Kako sans Chaos” ne prend pas de détour. On est tout de suite propulsé dans ce petit village imaginaire, Kako, frappé par la mort de son chef. Les décors, sobres mais évocateurs, plantent un cadre qui sent la poussière rouge et les palabres sous l’arbre à palabres.
Sur scène, Milem, fils héritier du trône, rêve de liberté mais sera finalement poussé et encouragé à postuler pour le trône. Face à lui, Amidou, plus expansif, riche, généreux, dont la voix grave résonne comme une promesse de renouveau. Entre eux, le village hésite, se divise, se questionne… et nous avec.
Comme dans une série hollywoodienne, la bataille entre les deux hommes sera rude, chacun y va de ses qualités et parfois à coups de billets de banque pour séduire l’électorat villageois. Tout cela sous les yeux du public qui alterne éclats de rire et murmures approbateurs.
Une réplique bien sentie déclenche une vague d’hilarité dans les gradins ; un face-à-face tendu fige les corps dans une écoute religieuse. On se surprend à hocher la tête, à murmurer “ah, c’est vrai ça…” comme si on assistait à un vrai conseil villageois.
La mise en scène, signée Marcel Sangne, réalisateur et directeur de la photographie ivoirien primé, avec plus de 10 ans d’expérience dans le cinéma et la télévision, joue habilement avec les émotions : lumières chaudes pour les moments intimes, ombres prononcées pour les tensions, musique rythmée qui relance l’action.
Les costumes éclatent de couleurs, tissus chatoyants, boubous aux motifs soignés, et ajoutent à cette sensation de voyage au cœur d’un village à la fois familier et théâtralisé.
Le dénouement de la scène était loin de celui imaginé par le public. Le scénariste camerounais, Mbella Banta Cédric Armand, avait une tour de magie dans sa besace. Après l’élection remportée par Amidou, ce dernier sera renversé du trône par le « fils illégitime » du roi défunt. Amidou, le beau et le riche, sera arrêté pour trafic sexuel. Milem, quant à lui, devra regretter les mauvaises actions de sa mère.
« La Côte d’Ivoire a besoin de paix »
“Kako sans Chaos”, écrite en seulement deux mois, est le nouveau bébé de la compagnie MO’Entertainment, fondée par le talentueux Mohamed Lamine Sanogo. Ce transfuge de la chaîne nationale a pour ambition de créer un réseau de communication via la télévision et les plateformes numériques. Faire de l’Afrique la plaque tournante du paysage audiovisuel dans le monde est sa devise.
« Kako sans Chaos » n’est pas seulement une œuvre théâtrale, mais aussi un canal pour livrer un message, celui de la paix et des élections apaisées en Afrique, et particulièrement en Côte d’Ivoire. « Sans la paix, il n’y a pas de panels, de travail, d’événements, de théâtre. Il faut la paix. On ne veut point de chaos en Côte d’Ivoire et en Afrique », a-t-il souligné.
Même son de cloche de la part de la députée de Tengrela, Mariam Traoré. « Les Ivoiriens ont besoin de la paix, ils ont envie de rire. Nous ne voulons plus de bruits de bottes. Nous voulons préserver notre quiétude », a-t-elle lancé à la fin du spectacle.
À la tête du caucus des femmes de la Côte d’Ivoire pour la paix, Mariam Traoré a aussi invité les politiciens à « mettre balle à terre » et à « promouvoir la paix », avant d’annoncer des tournées dans le pays pour parler de paix aux populations avant la présidentielle d’octobre 2025. « Nous, les femmes de Côte d’Ivoire, nous sommes debout pour la paix », a-t-elle réitéré.
Le fondateur de la compagnie MOHAMEDIAS a exprimé sa satisfaction pour ce « succès » et a remercié les soutiens et partenaires. « Le théâtre est en train de renaître », a lancé Mohamed Lamine Sanogo, qui annonce d’autres représentations de la pièce, laquelle compte 23 acteurs.
À l’applaudimètre, le public était conquis. Les bravos fusent, certains se lèvent pour saluer les comédiens. Dans le hall, après le spectacle, les discussions s’animent : “Moi je pense qu’Amidou aurait été meilleur chef…”, “Non, Milem, c’est la tradition !”.
lignerouge.net